Peut-on concevoir un monde sans l'Homme ?
Peut-on concevoir un monde sans l'Homme ?
Ce sujet, pour le moins palpitant et intéressant, nous a été donné afin d'en rédiger l'introduction, mon intérêt pour lui a été tel, que je me suis décidé en rédiger la dissertation entièrement, bonne lecture !
Ce sujet, pour le moins palpitant et intéressant, nous a été donné afin d'en rédiger l'introduction, mon intérêt pour lui a été tel, que je me suis décidé en rédiger la dissertation entièrement, bonne lecture !
Introduction :
La première chose qu'on
note à la question de savoir si l'on peut concevoir un monde sans
l'Homme, est un paradoxe qui n'est pas évident à distinguer. En
effet, en voulant répondre spontanément à cette question, on coure
droit vers le contresens et on risque de produire une dissertation de
biologie. Tout l'enjeu de ce sujet se trouve dans la bonne déduction
du sens des termes du sujet. Il ne faut pas comprendre ici le terme
"concevoir" au sens de construction ou de formation, mais
au sens de représentation par l'esprit et d'imagination. Il ne faut
pas non plus prendre le "monde" au sens premier du terme,
c'est à dire au sens physique d'ensemble des réalités matérielles
car le monde dont il est question ici, c'est le monde au sens de
monde humain, c'est à dire l'ensemble des relations entre les
Hommes. Enfin pour l'Homme, il ne faut pas voir simplement l'Homme au
sens physique, donc du sexe masculin ou carrément au sens de
l'espèce, mais l'Homme au sens d'humanité, donc, l'ensemble des
sujets conscients qui forment le monde. Les termes du sujet étant
clairs, il est désormais plus simple de soulever le paradoxe du
sujet. Le problème que pose cette question, c'est celui de la
conception. Effectivement, concevoir, c'est imaginer par une
opération de l'Esprit, or, cette définition sous-entend que sans
esprit, toute conception est impossible, et c'est là le paradoxe,
car l'esprit désigne au sens ordinaire, le principe individuel de la
pensée, que l'homme possède. On comprend dès lors qu'il semble
assez farfelu d'espérer concevoir un monde, sans l'être nécessaire
pour penser ce monde, c'est à dire l'Homme lui-même. Il paraît
clair désormais, que la véritable question qui se cache derrière
ce sujet, est : Quel sens aurait un monde sans l'Homme ? Mais
demander si un monde peut avoir un sens sans l'Homme, c'est demander
par la même occasion si l'Homme est le seul à posséder cette
capacité à penser, c'est pourquoi nous serons amenés dans un
premier temps à démontrer que la pensée humaine donne un sens au
monde, puis dans une seconde partie nous étudierons l'hypothétique
existence d'un Dieu qui transcenderait l'Homme, avant de terminer par
la dernière partie où nous verrons que la pensée de l'Homme
constitue déjà une transcendance pour Dieu et le monde.
I. / La pensée
humaine donne un sens au monde
L'Homme est le seul des
vivants qui a la capacité d'intellection, grâce à son âme
(esprit), Aristote l'a démontré. Aristote fut en effet le premier
philosophe de l'Histoire à définir ce que c'est qu'un vivant. Il a
en effet démontré qu'un vivant est un être de la nature qui
possède une âme, "psyché" en grec, c'est à dire un
principe qui anime son corps et qui le met en mouvement, cependant,
selon Aristote, il y a trois types majeurs d'âme:
-L'âme végétative qui
est propre aux végétaux et qui leur permet de se développer en
sortant de Terre et en croissant.
-L'âme sensitive qui est
propre aux animaux et qui les dote de deux caractéristiques
fondamentales qui les différencie des végétaux : la sensibilité (les
sens) et l’auto-motricité, c'est à dire le fait de pouvoir se
mouvoir soi-même.
-Le dernier type d'âme
est l'âme humaine, qui se caractérise par la possession de
l'intellect, c'est à dire l'entendement, l'intelligence et la
capacité à comprendre et qui permet à l'Homme d'être ce
qu'Aristote appelle "un animal doué de raison".
Cette distinction des
différents types d'âmes permet de mettre en valeur le fait que
l'âme humaine est unique puisqu'elle semble être la seule à
permettre la réflexion. Grâce à son âme (esprit), l'Homme peut se
prendre lui-même pour objet de pensée, et donc, concevoir. En
outre, Descartes fait justement de l'Esprit et la capacité à
penser, l'ultime vérité qui définit et assure l'existence du
sujet, d'où la célèbre expression : "je pense donc je suis".
Bien au-delà de lui
permettre de réfléchir et de comprendre, l'esprit fait de l'Homme
un être conscient, c'est à dire un être en rapport avec tout ce
qui l'entoure. D'ailleurs, comme le disait Husserl, la conscience est
une activité de projection vers les choses qui est toujours au-delà
d'elle même et qui peut se projeter vers le monde, ses souvenirs ou
l'avenir. En somme la conscience est une relation ou une visée que
Husserl nomme "intentionnelle". Or, si la conscience est
une relation, alors c'est à travers l'activité de la conscience que
le monde est présent à l'Homme, c'est ce que Husserl essaye de
montrer tout au long de son œuvre en s'intéressant à la
perception. Il est en effet important de rappeler que la conscience
désigne la perception chez l'Homme de sa propre existence et du
monde qui l'entoure. On comprend, maintenant que nous avons démontré
que l'Homme était le seul à posséder un esprit, donc une
conscience, qu'il est le seul à pouvoir donner une signification ou
un sens au monde puisque pour ne serait-ce que définir, donc pouvoir
dire ce qu'est le monde ou le valider en tant que tel, il faut le
percevoir et lui donner un sens. Par conséquent, un monde sans
l'Homme serait dénué de sens puisque qu'il n'y aurait pas d'être
apte à lui en donner un.
Nous avons dans
l'introduction, définit le monde dont traite le sujet, comme
ensemble des relations entre les Hommes. Or, avec ce que nous venons
de démontrer, on constate qu'il y a peut-être un autre concept de
monde. Il y a en effet un mouvement qui s'est penché sur cette
vision là; il s'agit de la phénoménologie, d'ailleurs lancé par
Husserl. Selon ce mouvement, le monde est un horizon de sens pour
l'Homme. Pour ce mouvement l'Homme n'est plus un simple être, mais
un "être-au-monde", cette expression était utilisée par
Sartre, et Heidegger pour bien souligner que le monde en général
est avant tout une structure de sens visée par l'Homme comme horizon
de son action et de ses projets avant d'être un objet de
connaissance. C'est pourquoi pour la phénoménologie, l'Homme n'est
pas face au monde, mais dans le monde. Et on comprend dès lors que
l'Homme s'approprie le monde en quelque sorte et le définit comme
tel dans l'optique de ses projets. On peut en effet, tout comme
Schopenhauer penser, en se prenant personnellement, en tant que
sujet, que si l’on n’existe pas, le monde n'existe pas puisque
notre absence lui fait perdre son sens.
Nous avons démontré la
nécessité de la pensée de l'Homme pour donner un sens au monde,
mais, il nous reste toujours un problème d'ordre métaphysique. En
effet, en métaphysique l'esprit désigne tous les êtres immatériels
supposés doués d'intelligence, donc et entre autre, Dieu. Nous
allons désormais étudier son hypothétique existence qui remettrait
en question la nécessité de l’Homme.
II. /
L'hypothétique existence d'un Dieu qui transcenderait l'Homme et le
monde, met l'Homme de côté
Dieu est un objet
transcendant, autrement dit, qui échappe à la pensée et que l'on
ne peut saisir par la raison, donc qui échappe à l'Homme. Or, s'il
s'avère, comme l'affirme la thèse créationniste que l'univers tout
entier ainsi que l'Homme ont été crées par Dieu, alors l'Homme
perd toute son importance, et sa présence dans le monde peut-être
considéré comme une simple mise à l'épreuve de sa subjectivité.
En effet, Dieu étant parfait, doit nécessairement être doté de
l'intellect, et puisqu'il est tout puissant, il doit être la
transcendance qui fait exister le monde, d'ailleurs, pour la
métaphysique, Dieu est la cause première et parfaite de l'univers.
En outre, la théorie de Malebranche, intitulée "vision en
Dieu", affirme que toute la connaissance sensible et rationnelle
résulte de l'action de Dieu en nous et que par conséquent,
l'origine de nos idées, comme de nos sensations est donc en Dieu et
non dans l'expérience, comme l'affirment les empiristes, ni même
dans notre esprit, comme le soutiennent les innéistes. La théorie
malebranchiste affirme donc que même la conception du monde propre à
l'individu, c'est à dire le monde au sens phénoménologique, est
voulue par Dieu, ce qui retire toute supériorité et puissance à
l'Homme.
La plupart des religions
affirment que le monde et l'existence sont un défi lancé aux Hommes
par Dieu pour rappeler l'insignifiance et l'infériorité de l'Homme
et pour lui donner une chance de se rattraper. En effet, dans la
genèse, Adam est chassé du paradis et condamné à travailler à la
sueur de son front. Si l'on prend ce point de vue en compte, on
comprend que l'Homme n'est qu'un être inférieur et insignifiant au
monde, et par conséquent non-nécessaire pour que le monde existe,
et on peut logiquement même considérer que le monde est en fait un
phénomène qui met à l'épreuve la subjectivité. On comprend dès
lors pourquoi Dieu est si nécessaire à la philosophie de René
Descartes pour valider l'existence du monde et des autres, il est
possible comme Descartes de douter de tout jusqu'à l'existence de
son propre corps, mais pour ne pas en douter, il est nécessaire
qu'il y ait cette être qui dépasse la raison pour prendre le rôle
de cause de toute chose. Ainsi, l'Homme aurait besoin de Dieu, ce
qui est un nouveau signe d'infériorité.
La possibilité
d'existence de Dieu, change tout à la question, car Dieu semble être
à l'origine de tout jusqu'à la pensée de l'Homme. Cependant,
l'existence tout comme l'inexistence de Dieu n'ont pas étés
prouvées, ce qui fait qu'il reste un être hypothétique. Il faut
donc rester dans le traitement rationnel de la question, et c'est
pourquoi nous allons désormais voir que l'Homme reste au cœur de
l'action.
III. /La pensée de
l'Homme constitue déjà une transcendance pour le monde et pour Dieu
"L’Homme est
l'être dont l'apparition fait qu'un monde existe", ainsi
parlait Jean-Paul Sartre dans Situations II. On
comprend derrière cette affirmation que le monde attend l'Homme pour
exister. C'est déjà beaucoup plus clair en ajoutant ce que nous
avons mis en évidence dans la première partie. L’Homme avec sa
conscience donne une définition au monde, s'identifie à lui et lui
donne son sens de monde. Grâce à lui le monde existe, car il en est
tout simplement le créateur à partir du moment où il lui donne ce
sens, on comprend dès lors que ce qui fait le monde, c'est
l'accomplissement des désirs de l'Homme par son travail, sa culture
et ce qu'il ajoute à la nature. D'ailleurs, la discipline qui nous
pousse à poser cette question, c'est à dire la philosophie est la
preuve que sans la pensée Humaine, cette question ne pourrait pas
être posée du tout. L'Homme, cet "être-au-monde" dont
nous parlions tout à l'heure, au delà du fait qu'il est entouré de
tous les autres sujets conscients reste le seul à pouvoir les
reconnaître en tant qu'alter-ego et le seul à pouvoir les intégrer
dans son monde. C'est pourquoi Maurice Merleau-Ponty, dans son œuvre
sens et non sens, a dit la chose suivante : "Ce
monde qui avait l'air d'être sans moi, de m'envelopper et de me
dépasser, c'est moi qui le fais être". Le problème qui se
pose est que si les autres existent tout comme le sujet qui les prend
en compte, alors il y a autant de mondes que de sujets pour les
penser. Mais dans tous les cas, l'Homme reste au centre du monde.
La soif de connaissance
et l'envie d'apporter des réponses à la cause de son existence, ont
donné naissance à l'idée de Dieu. Dieu peut-être comparé au
mythe, car il reste l'objet d'un discours qui ne peut faire l'objet
d'expérience. Dieu est en fait la solution la plus simple, car on
ne peut ni nier son existence, ni la prouver. Cependant, si c'est
l'Homme qui conçoit le Dieu, un problème se pose. Effectivement,
comment affirmer que Dieu est un être parfait s'il ne peut pas
exister si l'Homme ne pense pas à lui ? On peut d'ailleurs faire un
lien entre ce point de vue là, et la pensée de Descartes dans Le
discours de la méthode. Dans son ouvrage, Descartes prouve
l'existence de Dieu, et la rend nécessaire à la validation de
l'existence du monde et des autres. Mais son discours est ambiguë,
car en effet, avant de penser à Dieu, il doute de tout, or douter
est une preuve d''absence de foi. Mais là n'est pas tout car
Descartes désacralise Dieu en le réduisant en simple objet
nécessaire. Cependant, on ne peut en fait pas lui en vouloir, car
Dieu provient de l'esprit des hommes, alors il est normal qu'il
puisse en faire ce qu'il veut. Il y a donc en conclusion une
interdépendance entre l'Homme et Dieu, car l'Homme a besoin de lui
pour donner une cause à son existence et Dieu a besoin de l'Homme
pour être reconnu comme être suprême, cela sous entend par la même
occasion que Dieu n'est pas supérieur à l'Homme, mais qu'ils ont la
même valeur. C’est le philosophe Hegel qui s’intéressa à cette
vision là du rapport entre l’Homme et Dieu.
Conclusion:
Nous avons donc montré
tous les problèmes que posait ce sujet, et on pourrait pour finir
dire que concevoir un monde sans l'Homme est impossible à moins
d'être un être supérieur, mais bien au delà de ça, même un
monde conçu par un être supérieur à l'Homme n'aurait pas de sens
si il n'y a pas d'Homme pour lui en donner un. D'ailleurs, rien que
l'idée d'un être supérieur à l'Homme ne peut être portée que
par ce dernier. L'Homme est le seul et unique inventeur de tous les
concepts de "monde" connus, et aussi du concept de "Dieu".
On dit souvent que le savoir est une arme, et nous pouvons tourner
cette expression à notre avantage pour illustrer la réponse au
sujet. Effectivement, on peut considérer que le monde est une arme,
et que l'Homme est le savoir. La question qui se pose c'est:
qu’est-ce qu'une arme sans le savoir ? Un simple objet inutile. En
somme, sans la pensée de l'Homme pour le reconnaître, le monde
n'est rien, et c'est pareil pour tout sujet, si un sujet n'est pas
reconnu par les autres, il est exclu de leur monde. Les Hommes sont
eux aussi interdépendants, car c'est à travers les autres que notre
existence prend son sens, c’est ce que l’on nomme
« intersubjectivité ». Donc, partant de ce point, on
peut régler le problème de la mort en affirmant que la mort est
tout simplement l’extinction de la conscience, la fin de la
relation entre l’Homme et le monde, donc la véritable fin du
monde.
Commentaires