Les dérives de l'anti-racisme en France

On entend de plus en plus ces derniers temps, en regardant les informations, les débats, les opinions populaires, que la France souffre d'un repli communautaire important. Autrement dit, certaines des nombreuses communautés étrangères qui composent le pays cosmopolite qu'est la France, ne se reconnaissent plus, ou du moins, semblent se marginaliser par rapport à ce que nous devrions appeler notre Nation. Psychanalystes, psychologues, philosophes et autres intellectuels s'interrogent en direct ou dans des livres plus ou moins partiaux sur les causes et les fondements de ce phénomène. 

Résultat de recherche d'images pour "griezmann blackface"J'ai beaucoup de mal ces derniers temps avec les intellectuels, les personnages publics ou encore les sportifs qui jugent certaines affaires, pour la raison qu'ils ne vivent pas la réalité du problème qu'ils traitent sur le terrain. Surtout lorsqu'il s'agit de racisme, c'est très compliqué d'accepter que quelqu’un d’une autre communauté dicte l'attitude que la communauté affectée doit ou devrait avoir face à un fait indignant. C'est ce qui, je pense a crée une division sur les réseaux sociaux et dans les médias pour les personnes à qui on a demandé l'avis sur l'affaire Antoine Griezmann notamment. En effet, il y a trois semaines, le footballeur partageait sur le réseau social Instagram, une photo de lui déguisé à l’occasion d'une soirée à thème, en joueur des Harlem Globe Trotters, une équipe d’athlètes acrobates noirs, connue pour ses spectacles et ses acrobaties spectaculaires en Basketball. Aucun problème ne se serait présenté si le joueur s'était contenté de porter la tenue officielle de l'équipe. Seulement, l'international Français a choisi d'aller jusqu'au bout de son déguisement en se grimant la peau en noir, de la tête aux pieds. Or, cette pratique est rattachée à un mouvement du XXe siècle (qui a débuté bien avant) aux Etats-Unis : le BlackFace, qui consistait en ce qu'un individu blanc se peigne la peau en noir pour imiter de façon humiliante les hommes noirs. Les caricatures faites déguisé de la sorte étaient à portée raciste, en adéquation avec la mentalité de l'époque. Même si cette pratique n'est plus répandue de nos jours, il est arrivé plusieurs fois que des personnalités populaires se griment la peau en noir, de la France aux Etats-Unis. Et il est important de noter que le geste a toujours été accueillit négativement. 

En France, suite au BlackFace de Griezmann, trois "écoles" se sont opposées : d'un premier côté, les personnes de la communauté noire française considérant que l'acte de Griezmann était raciste, mais pas l'individu et pour qui la suppression de la photo était nécessaire puisque déplacée. D'un second côté, on avait les personnes qui considéraient que parce que Griezmann avait agit de la sorte, il était raciste sans discussion possible. Enfin, on avait les personnes qui considéraient la réaction de la communauté noire était exagérée, du fait qu'il était évident que le joueur voulait simplement rendre un hommage en tant que fan, et qu'il avait des "amis noirs". 

De ces trois écoles, deux proposent des visions dérangeantes. La première étant celle qui juge que Griezmann est raciste par son acte. En effet, il n'est pas besoin d'être un ami proche du joueur pour savoir qu'il n'est pas raciste. Un acte, et surtout dans la situation que nous traitons n'est pas suffisant pour juger de la nature définitive d'un homme. Ce n'est pas parce qu'on tue qu'on est un assassin tout comme ce n'est pas parce qu'on joue au football qu'on est footballeur. L'international Français s'est excusé pour son geste, et a reconnu avoir été maladroit. C'est déjà assez noble pour le signaler. Un manque de connaissance de l'aspect historique oui, mais du racisme non. Ainsi par l'histoire qui est rattachée à la pratique du grimage, l'acte de Griezmann est raciste sans que ce dernier ne le soit. 

La seconde école à la vision dérangeante est celle qui considère la réaction de la communauté noire exagérée. Et, encore plus problématique est de constater que c'est une majeure partie de la communauté blanche qui s'y est opposée. Dans le monde, beaucoup de peuples ont subis des choses qui ont été classifiées ou non, ou encore plus ou moins, comme des crimes contre l'humanité. L'esclavage et la ségrégation font partie des sévices historiques que les personnes noires portent en elles. De la même façon que l'extermination des Juifs, Tziganes et autres peuples visés à l'époque par les Nazis restera à jamais marquée dans les esprits des générations à suivre. Ce qui est dérangeant lorsque des individus hors de ces communautés ayant subis l'oppression interfèrent dans une contestation, c'est leur illégitimité à juger du fait. Puis-je par exemple, en tant qu'homme noir, me permettre d'évaluer la réaction d'un petit-fils de déporté torturé et tué, comme exagérée face à une blague de mauvais goût sur la déportation ? Il est évident que non puisque jamais je ne pourrai ressentir ce qu'il ressent. Agir ainsi, serait déplacé voire audacieux.

Ce que je reproche actuellement en France, c'est le racisme dissimulé des personnes qui, au travers l'idée que la communauté noire abuse dans sa réactivité, diffusent en vérité une haine profonde pour elle. J'ai lu des choses et en ai vu, qui m'ont prouvé que des personnes souhaiteraient que la communauté noire se taise, non-pas pour éviter les divisions et le communautarisme, mais parce qu'elles ne considèrent pas que cette communauté a le droit à la parole puisqu'elle n'est déjà pas tout à fait à sa place en France. De l'anti-racisme et l'anti-communautarisme, nous passons à des attaques racistes dissimulées. Exactement comme ceux qui disent n'avoir aucun grief avec la communauté musulmane mais luttent secrètement pour que le voile disparaisse. Et, par ce genre d'articles et dans quelques commentaires sur les réseaux, c'est contre cette forme qui figure parmi les plus fourbes qui soient, que je voudrais lutter. Un individu ne sachant pas ce que cela signifie de nos jours, à notre époque, d'être noir en France et dans d'autres parties du monde, ne peut pas juger les réactions de l'individu qui se sent insulté par des pratiques comme le BlackFace. Et ce principe devrait être intégré d'office sans nulle possibilité de remise en question.

On essaiera peut-être dans un article futur, de traiter encore plus en profondeur de ce courant de pensées racistes tenues secrètes et révélées par des actes ou messages subliminaux en France. En attendant, il est peut-être utile de rappeler que l'on est en train de vivre une véritable révolution des mentalités dans le pays. La faute à la crise ? Qui sait ? La progression des votes pour le Front National lors des précédentes élections marque, je crois, l'entrée de la France dans une ère où les pensées vont tendre de plus en plus vers les extrêmes, et j'ajouterai même que l’extrémisme islamique n'est pas encore la plus inquiétante pour les jeunes français puisque ce n'est pas la radicalisation religieuse à l'heure actuelle, qui crée les divisions communautaires mais bien le racisme grandissant dans pays.   

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